Quatre personnes A, B, C, M ou quatre facettes d’une même personne, quatre voix. L’écriture efface sciemment les repères. L’identification de ceux qui parlent échappe sans cesse. A la lecture, très vite, on ne sait plus qui est qui, qui est la mère ou l’amant de qui. Dans une langue qui empêche toute linéarité de la narration et sonne comme une musique intérieure, scintille une poésie concrète et sensible du désespoir et de l’espoir, intimement mêlés.
Tous les spectacles de Sarah Kane parlent d’amour. Celui–ci en particulier. Manque répertorie les manquements, les chassés-croisés de gens qui se cherchent et se manquent, infiniment, indéfiniment. Ainsi manquer. Pas seulement de l’autre. Mais manquer l’autre, passer à côté de lui, sans cesse. Un joyeux gâchis partagé. On entend là une force des sentiments inadaptée au réel, qui peut-être même nie le réel et témoigne d’une inaptitude extrême et belle à vivre (le réel).
Ici, quatre interprètes seront face au public portant l’intégralité du texte de Sarah Kane. Deux micros sont plus près du public pour un plan de réalité, d’incarnation de fragments de texte de Sarah Kane par un cinquième interprète, de profil, sorte de commentateur ou écho des autres et interlocuteur des autres. Il incarne tour à tour toutes les figures du texte. Un guitariste accompagne la recherche.